Klaus Barbie (
Bad Godesberg,
Allemagne,
25 octobre 1913 -
Lyon,
France,
25 septembre 1991) était le chef de la
Gestapo de
Lyon, surnommé « le boucher de Lyon ».
Origines et débuts SS en Allemagne
Né à
Bad Godesberg le 25 octobre
1913, Klaus Barbie obtient son
Abitur (baccalauréat) en
1933 et adhère aux Jeunesses hitlériennes (
Hitlerjugend). En
1935, il est admis à la
SS. La même année, il commence à travailler au service central du
SD (Sicherheitsdienst, service de sécurité du parti nazi, qui deviendra service de renseignements du Reich par un décret du 11 novembre
1938) à
Berlin. Il reçoit ensuite une formation d'enquêteur au quartier général de la police de l'Alexanderplatz. Après quelques semaines à la brigade criminelle, il est affecté à la brigade des moeurs. En
1936, il est muté à Düsseldorf. L'année suivante, il passe par l'école du
SD à Bernau avant d'être envoyé suivre un cours d'officier à Berlin-Charlottenburg. Les listes du NSDAP ayant été fermées en avril
1933, ce n'est qu'à leur réouverture en
1937 que Barbie devient membre du parti. Fin
1938, durant trois mois, il effectue son service militaire au 39e
Régiment d'infanterie, puis poursuit sa formation d'officier. Le 20 avril
1940, il est nommé
SS-Untersturmführer (
Sous-lieutenant SS). Quelques jours plus tard, il épouse Regine Willms qui a adhéré au parti nazi en
1937 et travaille dans une crèche de l'association des femmes nazies.
Activités SS à l'étranger : les Pays-Bas
En
1940, après l'invasion des
Pays-Bas, Klaus Barbie y est envoyé au sein d'un détachement de la Sipo-SD (Sicherheitspolizei und Sicherheitsdienst, police de sécurité - État - et service de sécurité - parti nazi) à la section VI (Amt VI, Ausland-SD, renseignements à l'étranger) chargée de la préparation du débarquement en
Grande-Bretagne. Avant même que celui-ci ne soit annulé, Klaus Barbie est muté à la section IV (Amt IV, improprement appelée
Gestapo, en fait formée des sections II et III de la Gestapa et de la section centrale III2 du SD Hauptamt). Dans ce cadre, d'abord à la Hague, puis à
Amsterdam, il participe activement à la poursuite et à la rafle des juifs, des francs-maçons et des émigrés allemands. Il "travaille" avec tant de zèle qu'en octobre
1940, il est promu
SS-Obersturmführer (lieutenant
SS). Pour avoir été l'un des officiers les plus énergiques dans l'assaut du ghetto juif d'
Amsterdam et pour avoir commandé des pelotons d'exécution, il est décoré de la croix de fer de seconde classe (
Eisernes Kreuz II.Klasse) le 20 avril
1941.
Activités SS à l'étranger : front russe, mission secrète en Suisse, poste en France
Selon Tom Bower, bien que cela ne soit pas mentionné sur ses états de service, Klaus Barbie aurait été envoyé en
Russie, de l'été
1941 au printemps
1942, dans un commando spécial de la Sipo-SD, chargé de la lutte contre les partisans sur les arrières de l'armée allemande. Au printemps
1942, comme il est bien noté et qu'il parle français, Klaus Barbie est nommé chef de la sécurité à Gex, sous-préfecture de l'Ain en
France, à proximité de la frontière suisse. En fait, une mission délicate l'attend : il doit enlever Alexander Foote, un agent secret travaillant pour l'URSS à
Genève. Barbie réussit à soudoyer le chef d'un poste de la garde-frontière suisse et s'introduit à Genève avec une voiture, mais Alexander Foote a disparu... En juin
1942, Klaus Barbie est affecté au KDS (Kommando der Sipo-SD) de Dijon, puis, après l'invasion de la
Zone libre en
France par les
Allemands en novembre
1942, au KDS de
Lyon (commandé par Rolf Müller, puis, début
1943, par Fritz Hollert et, à partir de l'été 43, par Werner Knab) où il prend le commandement de la section IV (lutte contre les résistants, les communistes, les juifs...).
Activités SS en France et en Allemagne
En février
1943, Klaus Barbie devient le chef de la
Gestapo de la
région lyonnaise (troisième officier, par ordre d'importance, au sein du KDS de Lyon). Sous ses ordres, sont torturés et exécutés de nombreux résistants, dont
Jean Moulin. Il arrête aussi personnellement, à la demande de Ribbentrop, en août
1943,
Albert Lebrun et André François-Poncet en Isère. Surnommé « le boucher de Lyon », il donne l'ordre d'exécuter de nombreux otages et de
déporter des milliers de
Juifs à
Drancy - étape intermédiaire avant
Auschwitz. Parmi ses victimes, se trouvent les 86 personnes arrêtées le 9 février
1943 au siège de l'UGIF, situé 12, rue Sainte-Catherine à Lyon, mais aussi les 44
Enfants d'Izieu raflés le 8 avril
1944. Le
11 août de la même année, Barbie réussit à faire partir directement de
Lyon à
Auschwitz le dernier convoi de déportés avec 650 personnes dont 308
Juifs. Lors de son procès, il sera en outre et entre autres accusé d'avoir fait fusiller 22 otages, dont des femmes et des enfants, en représailles d'un attentat sur deux policiers allemands en
1943, d'avoir torturé ou fait torturer au moins une vingtaine de personnes en
1943 et d'en avoir fait fusiller au moins une quarantaine la même année, d'avoir fait fusiller 70
Juifs à Bron et beaucoup d'autres parmi les 120 prisonniers de la prison Montluc exécutés à Saint-Genis-Laval en été
1944, où il est vrai que, selon Max Payot, un agent français de la
Gestapo, Fritz Hollert, deuxième officier du KDS de Lyon, donc supérieur à Klaus Barbie, est présent. Durant le premier semestre de l'année
1944, Barbie dirige également le commando de la Sipo-SD qui accompagne les troupes de répression des maquis, notamment dans l'Ain et le Jura : il torture, tue ou fait tuer de nombreux villageois censés soutenir les maquisards... Après la Libération de la
France, il parvient, blessé, à gagner la ville de
Baden-Baden en
Allemagne. Le 9 novembre
1944, il est promu SS-Hauptsturmführer. En poste à Halle, puis à Düsseldorf et à Essen, il termine la guerre à Wuppertal.
Activités après guerre, traque et condamnation
Recherché par les Alliés comme criminel de guerre, l'ancien patron de la
Gestapo de
Lyon, aidé par un réseau d'anciens
SS, se fait discret et, sous un faux nom, s'invente une nouvelle vie. Trafiquant au marché noir, il tient même un cabaret dans l'agglomération munichoise sans être inquiété par la justice. Arrêté par les Américains, puis par les Britanniques, il réussit à s'évader. À partir du printemps
1947, il est employé par les services secrets américains qui l'utilisent, avec d’autres nazis, dans la lutte anticommuniste. En effet, au début de la
Guerre froide, le CIC (Counter Intelligence Corps, US Army) est vivement intéressé par l'expérience que Klaus Barbie a acquise en France contre la résistance communiste, surtout afin d'obtenir des informations sur la pénétration communiste des services secrets français, sur les activités du Parti communiste français en France, dans l'armée française et la zone française en Allemagne ainsi que sur celles des services secrets français dans la zone américaine !
À partir de 1948, la France réclame l'extradition de Klaus Barbie. Le Counter Intelligence Corps donne trois raisons pour expliquer la protection accordée à ce criminel de guerre : d'abord, que son aide est vraiment précieuse au moment de la Guerre froide, ensuite, que ses prétendus crimes contre la Résistance étaient des actes de guerre et que les Français recherchent davantage la vengeance que la justice, enfin, qu'on ne peut plus faire confiance à une France submergée par les communistes qui veulent en fait interroger Barbie sur la pénétration américaine du parti communiste allemand et des services secrets français ! Poursuivi notamment dans le cadre des deux procès intentés à René Hardy, suspecté d'avoir trahi Jean Moulin, Klaus Barbie est condamné par la justice française, en 1952 et 1954, à la peine capitale par Contumace.
En 1951, Barbie, accusé de vol par la police allemande, est exfiltré vers l’Argentine avec le concours des services secrets américains et de Krunoslav Draganović. Sous l'identité de « Klaus Altmann », il s’installe en Bolivie, obtient la nationalité bolivienne et dirige une entreprise d'exploitation du bois, puis, de 1966 à 1971, une compagnie maritime qui s'adonne au trafic d'armes au profit des dictatures militaires d’Amérique du Sud. À partir de 1964, il collabore activement avec l'armée bolivienne et donne des conseils pour la recherche et la torture des opposants. De 1965 à 1967, jusqu'à la mort de Che Guevara dans la jungle bolivienne, il semble qu'il soit de nouveau au service de la CIA. En 1971, il soutient le coup d'État du colonel Hugo Banzer, mais, sa compagnie ayant fait faillite, il s'installe au Pérou. Cependant, l'arrivée de Beate Klarsfeld l'oblige à regagner la Bolivie.
En effet, dès 1961, une enquête de la police allemande détermine que Klaus Barbie s'est réfugié en Bolivie. En 1969, lorsque sa fille Ute demande un visa pour l'Allemagne, les autorités découvrent finalement que « Klaus Altmann » est Klaus Barbie. Toutefois, face aux difficultés administratives, l'affaire est sur le point d'être classée quand les protestations de Beate Klarsfeld viennent la relancer. Néanmoins, Klaus Barbie, personnage important en Bolivie, est protégé par le régime Banzer jusqu'à sa chute en 1978, puis, après le coup d'État de 1980, par le nouveau régime dans lequel Barbie est nommé colonel honoraire des services de renseignements. Malheureusement pour lui, le gouvernement américain contraint le président bolivien à démissionner l'année suivante.
Après bien des péripéties et des atermoiements, après que le gouvernement socialiste français a accordé à la Bolivie une importante aide au développement, Barbie est expulsé vers la France en février 1983 pour avoir obtenu la nationalité bolivienne sous un faux nom. Sa défense étant assurée par l'avocat Jacques Vergès, il est jugé et condamné à la prison (résidence particulière sous surveillance) à perpétuité pour crimes contre l'humanité. En 1991, il meurt en prison à Lyon des suites d'un Cancer.
Commission
En 2008, le général français Paul Aussaresses révèle, dans un nouvel ouvrage intitulé
Je n'ai pas tout dit. Ultimes révélations au service de la France, que, dans les années 1970, le gouvernement français versa une commission conséquente à Klaus Barbie dans le cadre d'une vente d'armes à la
Bolivie.
Bibliographie
- Jacques Baynac, Les Secrets de l’affaire Jean Moulin, Seuil, 1998.
- Gérard Chauvy, Aubrac. Lyon 1943, Albin Michel, 1997.
- Isabelle Doré-Rivé (sous la dir.), Le procès Barbie: justice pour la Mémoire et l'Histoire, Lyon, Centre d'Histoire de la Résistance et de la Déportation, 2005?
- Max Lagarrigue, 99 questions... sur les Français durant l'occupation, Montpellier, CNDP, 2007.
- Jean-Pierre Ravery, Le procès d'un nazi, Éditions L'Humanité-Librairie Nouvelle, 1987.
Filmographie
Références
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Liens externes